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Imprimer 15/01/2022 IP/IT- Données personnelles

ARCOM - Des compétences et une organisation précisées

À la suite de la loi n°2021-1382 du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique, le décret n°2021-1853 du 27 décembre 2021, publié au Journal officiel du 29 décembre 2021, modifie les dispositions réglementaires du Code de la propriété intellectuelle afin d’investir l’ARCOM de ses missions et d’encadrer les nouveaux outils mis à sa disposition pour lutter contre le piratage en ligne.

Dans une précédente actualité (« La loi du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique » : https://www.lawprofiler.com/index.php?page=actualites&step2=detail&id=1628), nous faisions état de la création d’un nouveau régulateur : l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), issue de la fusion du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et de la protection des droits sur Internet (HADOPI). 

 Le décret n°2021-1853 du 27 décembre 2021, publié au Journal officiel du 29 décembre 2021, vient préciser les compétences et l’organisation de l’ARCOM en matière de protection du droit d’auteur et des droits voisins.

Ayant hérité des missions de la HADOPI et CSA, la nouvelle autorité est compétente, depuis le 1er janvier 2022, sur tout le champ des contenus audiovisuels et numériques : lutte contre le piratage, protection des mineurs, lutte contre la désinformation et la haine en ligne. L’ARCOM se décrit, elle-même sur son site internet comme « le garant de la liberté de communication, et veille à ce que les médias audiovisuels et numériques soient pluralistes et respectueux de toutes et tous ».

L’article L. 331-12 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) détaille plus précisément ses missions.

Premièrement, l’ARCOM assure « une mission de protection des œuvres et des objets auxquels sont attachés un droit d'auteur, un droit voisin ou un droit d'exploitation audiovisuelle mentionné à l'article L. 333-10 du code du sport, à l'égard des atteintes à ces droits commises sur les réseaux de communications électroniques utilisés pour la fourniture de services de communication au public en ligne ». Elle mène des actions de sensibilisation et de prévention auprès de tous les publics, notamment auprès des publics scolaires et universitaires.

Deuxièmement, l’ARCOM remplit « une mission d'encouragement au développement de l'offre légale et d'observation de l'utilisation licite et illicite des œuvres et des objets protégés par un droit d'auteur, un droit voisin ou un droit d'exploitation audiovisuelle mentionné au même article L. 333-10 sur les réseaux de communications électroniques utilisés pour la fourniture de services de communication au public en ligne ».

Troisièmement, et en dernier lieu, l’ARCOM est chargée d’une « mission de régulation et de veille dans le domaine des mesures techniques de protection et d'identification des œuvres et des objets protégés ». 

Au titre de ces missions, l’Autorité peut prendre différentes mesures (notamment l’adoption de recommandations, de guides de bonnes pratiques, de modèles et de clauses types ou encore de codes de conduite) afin d’informer le public sur l'existence des moyens de sécurisation, mais aussi d’encourager la signature d'accords volontaires susceptibles de contribuer à remédier aux atteintes au droit d'auteur et aux droits voisins ou aux droits d'exploitation audiovisuelle sur les réseaux de communications électroniques utilisés pour la fourniture de services de communication au public en ligne.

 Le décret n°2021-1853 du 27 décembre 2021 modifie la partie réglementaire du Code de la propriété intellectuelle afin d’investir l’ARCOM des missions actuellement confiées à la HADOPI.

Le décret vise par ailleurs à encadrer les nouveaux outils mis à la disposition de l’ARCOM pour lutter contre le piratage en ligne, notamment l’établissement d’une liste des sites portant atteinte de manière grave et répétée au droit d’auteur et aux droits voisins et la notification des « sites miroirs ».

Dans une approche dite « follow the money », l’Autorité administrative peut établir une liste publique des plateformes de partage de contenus audiovisuels et numériques portant atteinte "de manière grave et répétée au droit d'auteur et aux droits voisins". Cette liste noire a vocation à responsabiliser les acteurs qui souhaiteraient passer des relations commerciales avec ces sites (publicitaires, intermédiaires financiers…). Elle contribue ainsi à assécher les revenus publicitaires des plateformes diffusant des contenus illicites et de décourager les sites d’IPTV illégaux qui proposent un abonnement payant. Particulièrement opportune, cette disposition agit sur la « e-réputation » des plateformes, enjeu désormais majeur, et sur les principales sources de revenus de ces acteurs.

Pour établir cette liste, l’Autorité doit respecter une procédure contradictoire. L’engagement de la procédure d’instruction préalable à l’inscription est assuré par un rapporteur. Disposant de pouvoir d’enquête, ce rapporteur peut prendre en compte tout élément utile et solliciter les titulaires de droits d’auteur ou de droits voisins pour obtenir toutes informations utiles notamment sur les autorisations d’exploitation qui ont pu être consenties aux plateformes.

L’article R. 331-18 du Code la propriété intellectuelle, modifié par le décret, détaille le modus operandi. Le rapporteur ou l'un de ses adjoints peut se saisir de tout élément susceptible de justifier l'engagement de la procédure d'instruction préalable à l'inscription sur la liste. Le directeur général de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique lui transmet dès qu'il en a connaissance toutes informations susceptibles de justifier un tel engagement. Lorsque le rapporteur estime que les constats des agents habilités justifient qu'il transmette le dossier au président de l'autorité, il notifie les constats au service de communication au public en ligne en rappelant les conséquences d'une inscription sur la liste. Il l'invite à présenter ses observations dans un délai qu'il fixe. Le dossier transmis au président de l'autorité comporte les observations du service de communication au public en ligne ou mentionne l'absence de réponse. La convocation à la séance publique prévue au III de l'article L. 331-25 mentionne les éléments justifiant l'inscription du service de communication au public en ligne sur la liste. Elle précise au responsable de ce service qu'il a droit de se faire représenter et de se faire assister par tout représentant de son choix et qu'à défaut de comparution il s'expose à ce que la procédure d'inscription se poursuive en son absence.

La séance se tient dans un délai de deux mois suivant la transmission du rapport par le rapporteur au président. La décision prise par l'autorité est signée par le président et mentionne le nom des membres qui ont siégé. Elle mentionne le cas échéant le défaut de comparution personnelle ou de représentation de la personne convoquée.

Le nouvel article R331-9 du Code de la propriété intellectuelle détaille quant à lui la procédure lorsqu’est réalisée une demande de retrait de la liste par un service de communication au public en ligne.

Cette demande doit être adressée à l’ARCEM par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. 

La demande comprend :

1° S'il s'agit d'une personne physique, ses nom, prénom, adresse et coordonnées téléphoniques et électroniques et, si elle est assujettie aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de son inscription ;

2° S'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, les coordonnées téléphoniques et électroniques de la personne physique à joindre, et, s'il s'agit d'une entreprise assujettie aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de son inscription et l'adresse de son siège social et tout document attestant de ces formalités ;

3° L'ensemble des éléments permettant de justifier du respect des droits d'auteur et des droits voisins ;

4° L'engagement de répondre aux éventuelles demandes d'informations nécessaires à la vérification par l'autorité du respect des droits d'auteur et des droits voisins.

La demande est rédigée en langue française.

Si la demande n'est pas accompagnée de ces éléments, une demande de régularisation est adressée au demandeur ou à son représentant mandaté, qui doivent y répondre et apporter les compléments dans un délai d'un mois.

L'autorité délibère dans un délai qui ne peut excéder quatre mois à compter de la date de réception de la demande complète.

Concernant la lutte contre les « sites miroirs », c’est-à-dire les sites reproduisant le contenu d’un autre site web sous un nom de domaine différent, la loi du 25 octobre 2021 a conféré là encore des pouvoirs étendus à l’ARCEM. Afin de rendre plus effectives les décisions de justice exigeant le blocage d’un site diffusant des contenus contrefaisants, la loi autorise l’ARCEM, à demander aux intermédiaires, hébergeurs et fournisseurs d’accès, d’étendre le blocage aux « sites miroirs » si les contenus sont « identiques » ou « équivalents » à tout ou partie du contenu visé par la décision de justice. 

À cette fin, le décret précise, au sein du nouvel article R. 331-20-I CPI, la forme que doit revêtir la saisine adressée à l’ARCOM par un titulaire de droit d’auteur ou de droits voisins.

La saisine doit avoir lieu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de réception et de l'identité du destinataire, y compris par voie électronique. Elle comporte :

1° Une copie de la décision judiciaire passée en force de chose jugée, à laquelle le titulaire de droits est partie, ordonnant toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une atteinte à un droit d'auteur ou un droit voisin, à l'encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier en application de l'article L. 336-2 CPI ;

2° Les données d'identification du service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu du service mentionné par la décision ;

3° Une déclaration sur l'honneur selon laquelle l'auteur de la saisine est titulaire de droits ou a qualité pour agir au nom du titulaire de droits sur une œuvre ou un objet protégé concernés par la reprise et, le cas échéant, tout document justifiant des droits.

Dès réception du dossier complet, l'autorité en accuse réception par voie électronique.

Elle peut préalablement demander au titulaire de droits d'apporter, dans un délai qu'elle fixe, les éléments nécessaires. L'autorité ne donne pas suite à une saisine non complétée.