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Imprimer 31/08/2025 IP/IT- Données personnelles

Le conflit symbolique entre Chanel et la Cour de cassation : l’affaire du double « C » entrelacé par Lucien MAURIN

Au début des années 2000, la maison Chanel a adressé un courrier officiel à la Cour de cassation afin de l’alerter sur la similitude de son logo — deux « C » entrelacés — avec celui de l’institution judiciaire. La marque de luxe invoquait un risque de confusion et d’atteinte à sa réputation. Bien qu’aucun contentieux n’ait été porté devant les juridictions, la Cour a choisi de modifier son identité visuelle, illustrant une résolution amiable entre protection des droits de propriété intellectuelle et liberté institutionnelle.

I. Contexte 

Le logo de Chanel, deux « C » entrelacés dos à dos, a été créé en 1925 par Gabrielle Chanel et est devenu l’un des signes distinctifs les plus célèbres au monde. Dans le même temps, la Cour de cassation avait adopté un logo institutionnel reprenant un motif similaire de « C » entrelacés, utilisé jusque dans les années 2000. Cette proximité graphique a conduit Chanel à adresser un courrier à l’institution judiciaire, mettant en avant un risque de confusion dans l’esprit du public et une atteinte possible à l’image prestigieuse de la marque.

II. Les enjeux juridiques

A. Le droit des marques et l’antériorité

Chanel bénéficie d’un droit de marque antérieur sur son logo, dûment enregistré et exploité dans le cadre d’activités commerciales mondiales. En droit français comme européen, l’usage d’un signe similaire par un tiers peut être contesté, même si les activités exercées ne relèvent pas du même secteur, dès lors qu’il existe un risque de confusion ou un risque d’atteinte à la renommée de la marque.

B. La liberté d’identité visuelle des institutions

La Cour de cassation, en tant qu’institution publique, dispose de la liberté de définir ses propres symboles. Toutefois, l’adoption d’un logo trop proche d’un signe protégé soulève des difficultés d’image et d’interprétation, même en l’absence de finalité commerciale. Chanel a donc agi de manière préventive, tandis que la Cour a accepté d’adapter sa communication visuelle afin d’éviter tout conflit.

C. La résolution non contentieuse

Aucun litige n’a été porté devant les juridictions. La Cour de cassation a choisi de modifier son logo, en conservant deux « C » entrelacés mais représentés en caractères gothiques, rompant ainsi la confusion avec l’emblème de Chanel. Les anciens motifs sont toutefois toujours visibles dans les boiseries classées de la salle d’audience, témoignage historique de l’ancienne identité visuelle.

Cette affaire illustre l’importance de la vigilance dans la gestion des signes distinctifs. Même une institution publique doit tenir compte des droits antérieurs attachés à des marques de renommée. L’anticipation, par le biais d’un courrier formel mais non contentieux, permet souvent d’éviter une confrontation judiciaire. Enfin, l’équilibre entre préservation de l’image de marque et respect de l’identité institutionnelle se construit souvent par des solutions pragmatiques et symboliques, comme l’adaptation graphique retenue par la Cour de cassation.


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